Suzy et les éléphants
On l’a nommée Suzy. Elle portait sûrement un autre nom au sein de sa harde. Aujourd’hui, elle est enfermée dans un enclos assez vaste, en compagnie de Gitana, au parc Pari Daiza.
Quant elle était petite, on a tué sa mère. C’était au Zimbabwe en 1988.
L’ivoire, sans doute. Ou bien les zoos. Ou encore, le culling tel qu’on le pratiquait il y a peu au parc Krüger et qui consiste à massacre un nombre précis d’éléphants pour réduire leurs populations.
Ces prélèvements se mènent le plus souvent par voie des airs. Le tireur dans l’hélicoptère peut ainsi tout à loisir choisir sa cible et l’abattre à l’arme de guerre. Cela revenait chaque année. Les anciennes connaissaient les dates et elles tentaient alors d’emmener leur famille à l’abri des bosquets. En vain. Au jeu de la mort, l’homme reste le champion.
Suzy se tient sagement auprès du corps de sa maman, bien consciente que quelque chose de terrible venait d’arriver. Quand on emmena le cadavre, elle le suivit comme un petit chien Pas besoin de l’attacher. Il n’y avait plus personne. Tous partis. Tous morts. Ses tantes, ses sœurs, ses petits frères, ses grands frères toujours au loin, à se battre et à chercher des filles, mais qui revenaient au galop, toutes défenses dehors, quand un danger menaçait les leurs.
Tous partis. Tous morts ?
Elle eut de terribles cauchemars les nuits suivantes. Elle revivait la scène sans cesse et se réveillait en barrissant. Aucun des humains présents ne se soucia de son chagrin. Personne ne la prit dans ses bras. Très vite, on la dressa, on la frappa, on l’enchaîna, on lui mordit l’oreille avec un hook crochu, et le creux de l’aine, On la réduisit en esclavage, sans qu’elle comprit jamais pourquoi.
Le Harry Malter Familypark de Gand la donna au parc Pairi Daïza le 28 août 2010,
Sa compagne Chamba venait de mourir. On l’amena donc dans le Hainaut. Gitana vient la rejoindre ensuite. Susy a été la vedette de la Foire de Libramont, aux côtés d’un cheval de trait. Elle vit mourir Mausi, l’éléphante de cirque torturée, qui s’effondra quelques jours après son arrivée. De tristes souvenirs ont du lui revenir. Un éléphant a bonne mémoire.
Toute petite, elle a du en voir, des massacres, des mâles superbes abattus par des chasseurs friqués, d’autres mutilés de leur trompe et de leurs défenses. Elle a du en fuir, des humains féroces mais c’est parmi eux quelle vit aujourd’hui. Pour sauver l’espèce, paraît-il. Elle n’a encore jamais eu d’enfants.
Là-bas, chez elle, de nouvelles matriarches ont pris les commandes de nouvelles hardes. Elles affrontent aujourd’hui la plus grande vague de massacre de toute l’histoire des éléphants. La Chine veut l’ivoire. Al Qaeda veut l’argent. L’Afrique ramasse la donne.
Le temps est proche où les savanes d’Afrique et les forêts d’Asie seront vides de tout éléphant.
Seuls survivront des personnes comme Suzy, qu’on exhibe dans des parcs et qui, péniblement, engendreront peut-être un éléphanteau. Pas de quoi sauver l’espèce, ni assurer son renouvellement génétique. Rien non plus qui reproduise les conditions de vie réelle d’un éléphant. Plutôt que de céder à la fougue d’un mâle triomphant et superbe dont elle connaît le clan depuis des années, on lui amènera un étalon choisi par les homme, un inconnu. Elle finira ses jours dans la somnolence et l’ennui. Dans 50 ans, il n’y aura plus d’éléphants de zoo non plus.
Voilà ce que notre gouvernement protège, voilà ce que nos médias encensent.
Mais que fait-on pour les « vrais » éléphants, ceux qui vivent encore libres et dignes ? Quelle somme la Belgique investit-elle pour sécuriser les parcs nationaux congolais, pour assurer leur bonne gestion et leur promotion internationale ? Quel est le nombre de soldats dévolus à la stricte protection des Monts Virunga, ce trésor de biodiversité ? Pourquoi autorise-t-on une compagnie pétrolière à s’y installer ? Pourquoi la CITES se montre-telle si conciliante avec un trafic dont on connaît les auteurs et les lieux ?
Que dit l’Europe de ce génocide annoncé ? Quels moyens la communauté internationale met-elle en œuvre pour sauver ces êtres dotés de cultures et de conscience de soi, qui partageaient déjà la savane avec les premiers hominiens ?
Dans quelques années, les dernières tribus d’éléphants libres auront disparus de la planète. Sauf si nous agissons.
ACTION INTERNATIONALE 4/10/2013
Pourquoi Pari Daiza ne se joint-il pas à ce genre de campagnes ?
La Marche pour les éléphants. 4/10/2013. Bruxelles.
Nous affrontons aujourd’hui la plus grande crise de braconnage de tous les temps. Chaque année, des dizaines de milliers d’éléphants sont abattus pour leur ivoire. Les braconniers tuent les éléphants de tous âges. Nous avons pu voir que parmi les plus récentes des expéditions illicites d’ivoire, on trouvait les défenses d’éléphants très jeunes.
De même, les rhinocéros sont tués à un rythme sans précédent en Afrique et en Asie. De nombreuses espèces et sous-espèces de rhinocéros ont déjà disparu ces dernières années.
Les tigres sont chassés pour leur fourrure peaux et leurs os. Mais au fur et à mesure que leur espèce s’éteint, les lions d’Afrique sont en train de prendre leur place dans le commerce illégal d’espèces sauvages.
Et ce sont là que des espèces bien connues du public, du fait des grandes compagnies de protection de la nature et les médias.
Mais il y a tellement d’autres encore !
Saviez-vous que chaque année, plus de 180.000 pangolins sont tués pour leur viande et leurs écailles ?
Saviez-vous que plus d’un million de serpents et de crocodiles sont tués chaque année pour fabriquer des chaussures, des ceintures, des portefeuilles et des sacs à main ? Saviez-vous que la Namibie et le Canada vendent des centaines de milliers de peaux de phoques et d’otaries chaque année ?
Chaque année, près de 2 millions de perroquets sont vendus et la Chine consomme à elle seule 150 millions d’hippocampes.
Perroquet du Sénégal, le plus vendu de tous.
Le plus affligeant dans tout cela, c’est que personne n’a vraiment besoin d’ivoire, personne n’a vraiment besoin de corne de rhinocéros, d’ossements de lion, de peaux de serpents ou de peaux de phoques. Personne n’a vraiment besoin d’un perroquet en cage.
Notre monde devrait progresser au-delà de ce massacre de la faune, d’autant plus que nos enfants ne verront jamais ces espèces si le commerce continue. Nos organisations internationales ont échoué en matière de conservation de la faune. La CITES favorise le commerce de l’ivoire, la chasse à l’ours polaire et les trophées de chasse au lion. La CITES permet le commerce de rhinocéros vivants entre l’Afrique du Sud et la Chine.
La CITES est une organisation régulant le commerce de la faune sauvage avec plus de 170 pays membres. La CITES est totalement inefficace pour prévenir ce trafic illicite et le promeut au contraire en permettant ainsi à un commerce illégal de vendre et d’acheter légalement des milliers d’espèces ayant une valeur financière.
Un être magnifique, une culture fascinante
Il faut que ce soit des gens comme nous, des citoyens, qui réclament la fin du commerce des espèces sauvages.
Les animaux ne sont pas une marchandise. Nous ne permettrons pas cela, nous n’en consommerons pas, et nous ne garderons plus le silence sur les pays qui en consomment.
Si ce que nous défendons ici n’est pas entendu de nos gouvernements, nous ne verrons plus de lion que dans un zoo, plus d’hippocampe que dans un aquarium et plus de perroquet que dans une cage.
L’éléphant survit mal au zoo et s’y reproduit peu
Si nous parvenons pas à faire entendre nos voix, nous devrons vivre avec des savanes silencieuses, des forêts silencieuses, des océans et des cieux vides.